D'après un article de Catherine Salles, professeur agrégée de Lettres Classiques et Docteur ès Lettres à l'Université de Nanterre
Les revenants n'en finissent plus de « revenir » dans un XXIe siècle où l'on aime à frissonner.
En février est diffusée aux États-Unis la fin de la sixième saison de The Walking Dead. Une série inspirée de la bande dessinée éponyme, qui compte à ce jour 24 tomes. Rassurantes explications rationalistes des scientifiques et des médecins, notre temps n'est-il pas le nouvel âge d'or des créatures nocturnes maléfiques, en particulier aux États-Unis ? Le mystère horrifique rapporte beaucoup d'argent dans l'univers cathodique. La fête des Morts mexicaine de Spectre est contaminée par la célébration américaine de Halloween, le 31 octobre, productrice d'énormes profits, saturée de faux frissons. Car « on ne peut pas négocier avec la mort, mais on peut faire des affaires avec elle », dit un proverbe mexicain. Les revenants hantent littéralement l'imaginaire collectif américain, comme en témoigne depuis 2010 le très large succès de la série télévisée The Walking Dead.
Il est vrai que 32 % des américains croient fermement à l'existence de fantômes ou d'esprits des morts (plus 19 % qui n'en sont pas sûrs), selon un sondage Gallup publié en 2005 — ils sont 13 % en France, d'après une enquête de TNS Sofres datant de 2000. Il s'agit également d'un immense exorcisme de la mort. Le fait qu'elle est occultée dans la civilisation occidentale ne conduirait-il pas à un surcroît d'angoisse refoulée envers les défunts ? Les rituels mercantiles de Halloween n'en sont nullement exempts : aux États-Unis et en Angleterre revient régulièrement la peur de Voir des « méchants » non identifiés empoisonner les friandises offertes aux enfants quêteurs, ces intercesseurs modernes entre les générations présentes et passées; et, en France, en octobre 2015, ce sont des individus déguisés en clowns maléfiques armés de couteaux qui ont terrorisé des lycéennes...
Les Anciens ont une vision incertaine de l'au-delà. Une seule certitude : ne pas fâcher les morts.
Que se passe-t-il après le trépas ? sempiternelle question, que l'homme tranche dès l'Antiquité : le mort ne l'est jamais vraiment. Et revient — différemment, bien sûr, selon les époques, mais il est là, aux côtés des vivants. Non sans raison.
Enfer(s) et damnation ? Presque... Certes, le sort des âmes, selon les Anciens, varie, mais aucun n'est très plaisant. De quoi mobiliser dans l'au-delà une armée de mécontents, au grand dam des vivants. Demandez à un Grec ou à un Romain ce qu'est un mort, il aura bien du mal à vous répondre, car c'est une notion qu'il maîtrise difficilement. Et vous mêmes, en consultant textes ou documents figurés relatifs à la mort, vous aurez les mêmes hésitations. Le mort est un fantôme impalpable et sans force. Il a l'apparence du vivant, mais n'en possède ni la consistance ni la conscience. C'est une « ombre » immatérielle qui est la négation totale de la vie. En mourant, l'être humain a perdu la clarté du soleil, il vit dans de profondes ténèbres où la lumière ne pénètre pas. Aucune joie ne vient éclairer la tristesse ambiante de son univers. C'est une non-existence qui ne fait pas de différences entre les bons et les méchants. Les Anciens pensent qu'au moment de la mort l'âme quitte son enveloppe corporelle comme un souffle et descend dans le monde souterrain des Enfers.
Les revenants n'en finissent plus de « revenir » dans un XXIe siècle où l'on aime à frissonner.
En février est diffusée aux États-Unis la fin de la sixième saison de The Walking Dead. Une série inspirée de la bande dessinée éponyme, qui compte à ce jour 24 tomes. Rassurantes explications rationalistes des scientifiques et des médecins, notre temps n'est-il pas le nouvel âge d'or des créatures nocturnes maléfiques, en particulier aux États-Unis ? Le mystère horrifique rapporte beaucoup d'argent dans l'univers cathodique. La fête des Morts mexicaine de Spectre est contaminée par la célébration américaine de Halloween, le 31 octobre, productrice d'énormes profits, saturée de faux frissons. Car « on ne peut pas négocier avec la mort, mais on peut faire des affaires avec elle », dit un proverbe mexicain. Les revenants hantent littéralement l'imaginaire collectif américain, comme en témoigne depuis 2010 le très large succès de la série télévisée The Walking Dead.
Un surcroit d'angoisse refoulée envers les défunts ?
Il est vrai que 32 % des américains croient fermement à l'existence de fantômes ou d'esprits des morts (plus 19 % qui n'en sont pas sûrs), selon un sondage Gallup publié en 2005 — ils sont 13 % en France, d'après une enquête de TNS Sofres datant de 2000. Il s'agit également d'un immense exorcisme de la mort. Le fait qu'elle est occultée dans la civilisation occidentale ne conduirait-il pas à un surcroît d'angoisse refoulée envers les défunts ? Les rituels mercantiles de Halloween n'en sont nullement exempts : aux États-Unis et en Angleterre revient régulièrement la peur de Voir des « méchants » non identifiés empoisonner les friandises offertes aux enfants quêteurs, ces intercesseurs modernes entre les générations présentes et passées; et, en France, en octobre 2015, ce sont des individus déguisés en clowns maléfiques armés de couteaux qui ont terrorisé des lycéennes...
Qui a-t-il après la mort ?
Les Anciens ont une vision incertaine de l'au-delà. Une seule certitude : ne pas fâcher les morts.
Que se passe-t-il après le trépas ? sempiternelle question, que l'homme tranche dès l'Antiquité : le mort ne l'est jamais vraiment. Et revient — différemment, bien sûr, selon les époques, mais il est là, aux côtés des vivants. Non sans raison.
Enfer(s) et damnation ? Presque... Certes, le sort des âmes, selon les Anciens, varie, mais aucun n'est très plaisant. De quoi mobiliser dans l'au-delà une armée de mécontents, au grand dam des vivants. Demandez à un Grec ou à un Romain ce qu'est un mort, il aura bien du mal à vous répondre, car c'est une notion qu'il maîtrise difficilement. Et vous mêmes, en consultant textes ou documents figurés relatifs à la mort, vous aurez les mêmes hésitations. Le mort est un fantôme impalpable et sans force. Il a l'apparence du vivant, mais n'en possède ni la consistance ni la conscience. C'est une « ombre » immatérielle qui est la négation totale de la vie. En mourant, l'être humain a perdu la clarté du soleil, il vit dans de profondes ténèbres où la lumière ne pénètre pas. Aucune joie ne vient éclairer la tristesse ambiante de son univers. C'est une non-existence qui ne fait pas de différences entre les bons et les méchants. Les Anciens pensent qu'au moment de la mort l'âme quitte son enveloppe corporelle comme un souffle et descend dans le monde souterrain des Enfers.
Ixion sur la roue
Celui-ci est humide, obscur, froid, plein de moisissures. Ses trois fleuves — le Styx, l'Achéron et le Cocyte — ne sont que de grandes zones marécageuses et empuanties. Tout autour, les arbres sont desséchés; et leur fruits, morts. Des bruits sinistres se font entendre : grondements des fleuves, fracas de chaînes et des instruments de torture du Tartare. Deux divinités règnent sur ce domaine : l'inflexible Hadès (identifié par les Romains en tant que Pluton) et sa femme Perséphone. Dans le Tartare, sorte de forteresse en airain, sont réunis tous ceux qui, de leur vivant, se sont montrés irrespectueux envers les dieux. Tantale est soumis à un supplice lui interdisant de boire et de manger, Ixion est lié à une roue enflammée et ailée, pourvue de quatre rayons et qui tourne éternellement dans les airs.